SAS : Annulation des décisions prises en violation du régime statutaire des décisions collectives

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Revirement de jurisprudence !

Depuis une jurisprudence constante de 2010 (Com., 18 mai 2010, pourvoi n° 09-14.855, Bull. 2010, IV, n° 93), la Cour de cassation adoptait une lecture stricte des dispositions de l’article L. 235-1 du code de commerce, restreignant ainsi considérablement la possibilité d’annulation des actes et décisions contraires aux statuts de la SAS :

La nullité des actes ou délibérations pris par les organes de la SAS ne pouvait résulter que de la violation d’une disposition impérative du livre II du code de commerce ou des lois qui régissent les contrats (fraude, abus de majorité/de minorité, droit pour tout associé de participer aux décisions collectives etc).

En pratique, la violation des statuts de la SAS n’était ainsi quasiment jamais sanctionnée par la nullité de la délibération (d’autres sanctions étant néanmoins envisageables, telles que l’inopposabilité ou le responsabilité civile des dirigeants).

Par un important arrêt de revirement du 15 mars 2023 (pourvoi n° 21-18.324), la Chambre commerciale juge désormais que sont susceptibles d’annulation les actes ou délibérations pris en violation de clauses statutaires fixant la compétence exclusive de la collectivité des associés, lorsque cette violation est de nature à influer sur le résultat du processus de décision.

La solution nouvelle ne permet cependant pas de sanctionner par la nullité toute décision prise en violation des statuts de la SAS : la jurisprudence ouvre uniquement la nullité aux décisions prises en violations des règles statutaires de compétence de la collectivité des associés, ainsi que des formes et conditions statutaires pour l’adoption de ces décisions (règles de quorum, de majorité, de consultation, de convocation etc).

En outre, la nullité ne pourra être encourue que si la violation des règles statutaires est « de nature à influer sur le résultat du processus de décision », ce qui donnera lieu à une interprétation au cas par cas.

L’action en nullité est soumise à des délais de prescription variables (3 mois pour une augmentation de capital ; 6 mois pour une fusion/scission ; 3 ans dans les autres cas).

Cette décision rappelle la nécessité d’être particulièrement précis dans la rédaction et le suivi des statuts de SAS, à la création et en cours de vie sociale.

 

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